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Élaboration du rhum

L’élaboration du rhum suit un déroulement bien précis, depuis la récolte de la canne à sucre, jusqu’au vieillissement en fût des rhums obtenus par fermentation puis distillation. Le processus décrit ici correspond à celui du rhum agricole tel que défini par la réglementation française.

Culture et récolte de la canne

La canne à sucre est une plante à croissance rapide, dont la culture, bien que possible à partir des graines qu’elle produit, a en pratique lieu par bouturage. Entre le moment où les petits plants sont plantés, et où la canne est récoltée, 12 à 18 mois peuvent s’écouler, en fonction de la latitude et de la période à laquelle les plantations ont été faites. Lorsqu’elle atteint la mâturation requise, que la teneur en saccharose est idéale, elle est coupée à la base (à la main ou selon un processus mécanisé).

Le pied repoussera sans qu’il soit nécessaire de le replanter. La souche peut avoir une très longue durée de vie, mais la qualité du sucre que contient le roseau va décroissant au-delà d’une décennie. En moyenne, une souche est exploitée durant 5 à 8 années.

Préparation de la canne

La canne, immédiatement après récolte, est acheminée jusqu’à la rhumerie. La qualité du produit est contrôlé : d’abord on pèse les cannes, ensuite on détermine la teneur en saccharose du produit, afin de s’assurer qu’il est bien conforme aux normes de qualité en vigueur. Cette étape (pesée, évaluation de la teneur en sucre) a également lieu dans les vignobles français.

L’acidité de la canne est également vérifiée, car celle-ci peut s’altérer très rapidement sous l’action conjointe de la chaleur et des bactéries présentes dans tout élément de nature organique.

Broyage

Le processus est ensuite mécanisé : un grappin se saisit des cannes qui ont été déchargées à la rhumerie, et celles-ci sont posées sur un pont roulant qui va les acheminer jusqu’à un appareil appelé « coupe-cannes », chargé de les débiter en petits tronçons.

Un second appareil, le schredder, prépare les tronçons en les martelant, de sorte qu’un maximum de jus de canne puisse en être extrait.

canne à sucre dans un broyeur
Broyage de la canne à sucre pour en extraire le jus.

Plusieurs moulins à vapeur prennent ensuite le relais pour effectuer le broyage proprement dit. Chaque moulin va successivement réaliser ce que l’on appelle une pression à froid, au cours de laquelle la fibre du végétal broyé va exprimer tout le sucre qu’elle contient. Afin d’améliorer l’extraction du précieux jus, la fibre peut être imbibée d’eau ou des jus obtenus lors du passage dans les premiers moulins.

Une opération de filtrage a ensuite lieu, afin de séparer le jus (la matière noble) des résidus fibreux, la matière vile appelée aussi bagasse. La bagasse, dans certaines exploitations mécanisées, sert de combustible afin de générer l’énergie nécessaire à tout le processus d’élaboration du rhum.

C’est le jus de canne (ou vesou) obtenu au cours de cette opération qui va servir à l’élaboration du rhum agricole.

La fermentation

Étape cruciale, la fermentation a lieu dans des cuves en inox. Le vesou va fermenter durant 18 à 24h, parfois un peu plus longuement, selon la typicité recherchée, grâce à l’adjonction de levures de boulangerie qui, en contact avec le sucre, vont entraîner un processus chimique unique. La fermentation du jus est alors réalisée à une température comprise entre 38°C et 40°C, et régulée par un système de refroidissement dans lequel circule une eau de rivière, laquelle n’est pas en contact avec le vesou, mais est contenue dans un serpentin métallique qui assure le refroidissement.

jus de canne qui fermente dans une cuve
Fermentation du jus de canne à sucre.

La fermentation est une opération rapide, mais extrêmement importante, qui doit être réalisée avec soin, car elle permet la génération d’une grande partie des arômes non alcooliques que l’on retrouvera en bouche au cours de la dégustation.

À l’issue de la fermentation, un « vin » dont la teneur en alcool ne dépasse pas 4 ou 5% est donc produit.

La distillation

La distillation continue est un processus alchimique complexe qui a lieu dans des colonnes à distiller dont la base est chauffée. Concrètement, le vin obtenu lors de la fermentation est acheminé jusqu’à la colonne, où on sépare l’alcool de l’eau en se servant d’une particularité physique propre à l’alcool de cannes et à l’eau : une température d’ébullition dissemblable. En effet, tandis que l’alcool de cannes bout à 78.4° C, l’eau bout quant à elle à 100° C. Ainsi donc, en portant le vin à une température comprise entre 78,4° C et 100° C, on a l’assurance d’obtenir une ébullition qui va ne concerner que l’alcool et pas l’eau, grâce à quoi les deux éléments vont pouvoir se séparer.

La partie inférieure de la colonne à distiller est composée de plateaux perforés (une vingtaine) qui servent à l’épuisement du vin : ce sont eux qui vont permettre à ce jus fermenté et porté à ébullition de se séparer d’une grande partie de son eau. La partie supérieure de la colonne à distiller va quant à elle servir à la concentration de la vapeur en alcool, et est elle aussi composer de plateaux (moins de 10).

La circulation du vin dans la colonne suit un mouvement bien particulier : ce jus titrant 4 ou 5% d’alcool, chauffé, atteint le milieu de la colonne à distiller, et arrive très exactement dans la zone supérieure de la partie dédiée à l’épuisement. La gravité entraîne le vin vers le bas : il passe, petit à petit, de plateau perforé en plateau perforé, jusqu’à atteindre le bas de la colonne. Au même moment, la vapeur remonte et gagne les régions supérieures de la colonne, entraînant au passage toutes les substances volatiles contenues dans le vin (qui circule quant à lui en sens inverse dans les plateaux perforés), à commencer par le précieux alcool, et les arômes qu’il contient.

La vapeur, lorsqu’elle gagne la région supérieure de la colonne, se condense avant d’être réinjectée, au cours d’une opération appelée rétrogradation dans le bas de la colonne où elle remonte une seconde fois et se charge à nouveau en alcool et en arômes.

Au terme de ces deux circulations concurrentes, qui ont lieu en mouvement contraire, et qui composent la distillation, le rhum proprement dit atteint le refroidisseur, où il titre alors entre 70 et 75 % vol. À l’issue de la distillation, le liquide alcoolisé obtenu est une eau-de-vie puissante qui doit encore être étendue d’eau de source, afin de réduire son degré d’alcool au titre souhaité, puis séjourner quelques semaines dans des cuves en inox avant de pouvoir être mise en bouteille et déclarée propre à la consommation.

La maturation

Le liquide qui sort de l’alambic est en effet, à peu de choses près, le rhum blanc que l’on déguste. Il doit séjourner au moins six semaines dans des cuves en inox, au cours d’une étape dite de maturation, où il sera allongé à l’aide d’une eau de source, pour que son titre en alcool diminue et atteigne un degré standard, tel que défini par les législations en vigueur dans les pays où il sera exporté.

Au cours de cette étape, un processus d’affinage a lieu, grâce à un brassage et à une aération régulière, qui permet l’élimination d’éventuels composés volatils .

Après cette maturation de six semaines en cuve d’inox, le rhum blanc peut être mis en bouteilles et commercialisé.

L’élevage

L’élevage du rhum est une étape qui dure au minimum 12 mois, et au maximum 36 mois, durant laquelle l’alcool est entreposé dans des fûts ou des foudres en chêne. On dit alors que le rhum a été élevé sous bois. Durant cette période, on produit un rhum qui, au nez comme en bouche, acquiert des notes boisées qui viennent enrichir la gamme des saveurs.

À partir d’un alcool originellement translucide, et qualifié de « blanc », on va assez rapidement, au cours de l’élevage, obtenir un nuancier de couleur particulièrement vaste :

Le vieillissement

Le rhum blanc n’aura séjourné que 3 mois dans une cuve en inox. Il se présente tel qu’au sortir de l’alambic.

Au-delà de 36 mois, le rhum qui reste entreposé dans des contenants en chêne de moins de 650 litres est qualifié de « rhum vieux ». À partir de ce moment commence l’étape dite de vieillissement, au cours de laquelle seront produits des rhums Très Vieux, ou Hors d’Âge.